Latifa Ibn Ziaten : «Pour que les enfants d’origine maghrébine aiment la France, il faut la mixité»
Contre le «cœur vide» et les «ghettos fermés» de la République. Engagée dans la lutte contre la radicalisation des jeunes, Latifa Ibn Ziaten semble perdre courage. Les attentats du 13 novembre sont venus entamer sa détermination à sillonner la France des écoles et des prisons pour porter son message de tolérance. Jeudi, en recevant le prix de la fondation Chirac pour la prévention des conflits, la mère de la première victime de Mohammed Merah en 2012 a demandé l’aide de l’Etat et de François Hollande. «Quand je suis allée voir mon fils, ce bel homme, à la morgue, j’ai pris sa main, raconte la mère d’Ihmad. Et je lui ai dit : "Je t’ai élevé avec des valeurs républicaines" et je suis fière du pays qui m’a accueillie. Alors j’ai promis à mon fils, je lui ai donné ma parole mais j’ai besoin d’aide pour passer ce message de paix et de vivre ensemble.» Au premier rang, François Hollande écoute sans un mouvement. Avant de monter à la tribune, Latifa Ibn Ziaten avait pris place entre les ministres Christiane Taubira, Fleur Pellerin, Najat Vallaud-Belkacem et Marylise Lebranchu. La diversité incarnée.
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Sans note, en larmes et portant son voile noir et blanc, elle s’est élevée contre ces classes composées à «95% d’enfants d’origine maghrébine»dans les banlieues. «Ils ne peuvent pas avancer, s’intégrer, aimer la France. Pour aimer la France, il faut leur tendre la main, il faut la diversité, il faut la mixité», insiste celle qui milite depuis trois ans pour le dialogue culturel et interconfessionnel. «Mon fils est mort debout et je reste debout à chaque fois que je témoigne.»
Au problème «très grave» dans les écoles répond le «problème très très grave» dans les prisons. «Il y a des gens qui se convertissent. Il n’y a pas de règle dans les prisons. On dit les droits de l’homme, mais on doit faire des règles dans les prisons. Des règles pour le sport, pour les heures de télévision. Ce n’est pas le prisonnier qui commande. Les gens qui travaillent dans les prisons, ils souffrent, ils demandent de l’aide. On doit travailler, on doit aller vers l’autre.» Latifa Ibn Ziaten réclame aussi des moyens pour son association de lutte contre la radicalisation, «Imad Ibn Ziaten pour la jeunesse et la paix». Son association intervient auprès des enfants, adolescents et jeunes adultes, de tous les milieux sociaux, notamment de détenus en milieu carcéral. Jamel Debbouze en est le parrain. Mais depuis trois ans, elle galère avec deux fonctionnaires et même pas de toilettes. «Si vous ne m’aidez pas, je perds mon courage», prévient-elle avant de promettre : «Je resterai toute ma vie à combattre. J’aime le Maroc, j’aime la France, c’est mon père et c’est ma mère. Je n’aime pas les séparer.»
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