Les droits des femmes, du ministère aux couches-culottes



Laurence Rossignol vient d’être nommée ministre de la Famille, de l’Enfance et des Droits des femmes. Dans le même temps, la députée Ericka Bareigts devient secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre, chargée de l’égalité réelle (à l’heure où nous mettons sous presse, des dizaines de personnes en France se grattent encore la tête, se demandant ce que veut bien dire le terme «égalité réelle». Une tautologie comme un bégaiement ?).
Les faits sont têtus : durant un quinquennat, les droits des femmes auront - au moins symboliquement - considérablement rétréci, passant d’un ministère de plein exercice (avec à sa tête Najat Vallaud-Belkacem), à un secrétariat d’Etat rattaché aux Affaires sociales, pour finir, certes dans un ministère, mais accolé… à la Famille et à l’Enfance. Les femmes, les enfants, la famille : bienvenue en 2016.
«Mettre sous un même Ministère “la famille, l’enfance et les droits des femmes”, n’est-ce pas enfermer les femmes dans le rôle stéréotypé qui leur est assigné depuis des siècles : celui d’épouse et de mère ?», se demandent alors Danielle Bousquet, présidente du Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes, Chantal Jouanno, présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité du Sénat, et Pascale Vion, présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité du CESE.
Le collectif Les effronté-e-s renchérit : «Encore une fois, comme c’était de coutume sous la droite, l’État assigne les femmes aux thématiques de la famille et de l’enfance !» Avant de conclure : «Ce sera un communiqué bref, à l’image de la stupéfaction des effronté-e-s : nous voici sans voix».
Rappelons que la création d’un ministère dédié aux Droits des femmes était un engagement du candidat Hollande, et qu’on n’avait pas vu cela en France depuis celui d’Yvette Roudy, en 1985.
A l’époque de sa re-création, en 2012, les féministes avaient applaudi, espérant, pauvres naïves, que du coup, enfin, les droits des femmes, qui sont loin d’être circonscrits à la famille et l'enfance - et concernent, par exemple, l’emploi, l’éducation, la santé, la justice - auraient leur place au gouvernement ; qu’un-e vrai-e ministre, siégeant comme tel-le en Conseil des ministres, pourrait influer sur le cours des choses, des discussions, des projets gouvernementaux ; et donc que les droits des femmes, sujet transversal par excellence, seraient partout.
Elles auraient sans doute dû se méfier lorsqu’on elles ont appris, dès 2012, qu’on avait attribué à Najat Vallaud-Belkacem, la double casquette de ministre ET de porte-parole du gouvernement ; comment concilier les deux ? Vous avez quatre heures.
Elles se sont méfiées lorsqu’en 2014, ledit ministère est devenu un secrétariat d’Etat, rattaché au ministère des Affaires sociales, de la santé et des Droits des femmes.
Aujourd’hui, même si les féministes sont parfaitement conscientes de l'attention particulière que porte Laurence Rossignol à ces questions - c'est en partie pour cela qu'en 2014, la Manif pour Tous avait été ulcérée d'apprendre sa nomination à la Famille -, elles s’alarment de voir ces sujets accolés à la Famille et à l’Enfance, renvoyant symboliquement les femmes à leur fonction supposée première : enfanter et fonder un foyer.

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